Il y a eu l’époque du gros rouge qui tache (on parle de vin ici). Les personnes qui consommaient du cannabis avant sa légalisation se souviennent aussi du gros pot qui assomme et rend parano. C’est souvent à cause de ce dernier qu’elles se sont détournées du cannabis. On les comprend. La légalisation est cependant venue mettre de l’ordre dans un milieu où c’était la loi du plus fort. L’offre s’est raffinée. Nos connaissances aussi.
Un des effets les plus fréquemment reprochés au cannabis, au temps de son illégalité, était sa propension à provoquer des épisodes anxieux. C’est aussi ce qui a poussé bon nombre d’utilisateurs à cesser d’en consommer.
La légalisation a toutefois changé la donne en permettant aux consommateurs de savoir exactement ce qu’ils achètent. La recherche commence, quant à elle, à mieux cerner les profils d’utilisateurs et à comprendre comment ceux-ci répondent aux différents cannabinoïdes et aux terpènes.
La loi du plus fort
Revenons un instant aux temps anciens (!) de la prohibition. L’époque où du « pot », c’était du « pot ». Où on n’avait aucune idée si ce qu’on fumait était de l’indica ou du sativa. De toute façon, on n’aurait pas trop compris la différence entre les deux.
Beaucoup de néophytes du weed – dont l’auteur de ces lignes – ont été initiés avec des cultivars inappropriés pour l’expérience qu’ils recherchaient. Nombreux sont ceux qui ont abandonné le cannabis après des épisodes désagréables d’anxiété et de paranoïa. Ce n’était simplement pas pour eux.
On peut blâmer la logique du contrebandier, qui pousse à élaborer des versions plus concentrées d’un produit lorsqu’il est interdit. Certains font le lien entre la « guerre à la drogue » dans les années 70 et l’invention des « skunks » et des « super skunks », des variétés avec des taux de THC au-dessus des normes de l’époque. Le problème venait aussi beaucoup du manque d’imputabilité dans toute la chaîne du marché noir, depuis le producteur des fleurs jusqu’à la personne qui les consomme.
La légalisation a corrigé ces deux dynamiques. Maintenant, les fournisseurs légaux, dont la Société québécoise du cannabis, offrent des produits de cannabis diversifiés et testés en laboratoire. Des consommateurs échaudés par leurs expériences passées pourraient ainsi reconsidérer leur relation au cannabis.
Mais par où commencer?
D’emblée, il faut admettre que les différents agents psychoactifs qu’on trouve en diverses proportions dans le cannabis ont un potentiel anxiogène. Les chercheurs derrière l’étude la plus souvent citée sur la question suggèrent que ce sont les perturbations de la perception – sons, lumière, temps qui passe – qui provoqueraient chez certains une paranoïa temporaire. Nos repères s’effacent, la tête s’emballe.
Comme c’est le THC qui occasionne ce désordre, ça semble donc une bonne piste pour commencer sa quête.
Le taux de THC d’un cultivar ne donne pas toujours le meilleur indicateur de sa « puissance ». On en sait encore peu sur la chose, mais l’effet d’entourage des autres cannabinoïdes, le plus connu étant le CBD, et des terpènes semble être un facteur déterminant.
Explorer les variétés sous l’angle de leur profil de terpènes peut être une manière efficace de trouver son champion. Le linalol, le pinène, le caryophyllène et le limonène pourraient notamment apaiser l’anxiété.
Cibler des variétés avec un rapport similaire de THC et de CBD (comme du 1:1 ou du 2:1) pourrait également aider à garder un meilleur sens de la réalité (1).
L'indica aura tendance à avoir un effet relaxant, alors que le sativa a la réputation de stimuler l’imagination, ce qui n’est pas nécessairement un avantage pour ceux et celles chez qui s’inventent facilement des histoires (2).
Y aller mollo
Dans le cas où, malgré les meilleurs efforts, la paranoïa s’inviterait, il y a un truc qui mérite d’être essayé : humer ou croquer des grains de poivre frais. La science n’est pas encore catégorique sur les fondements de cette interaction, mais on sait que le poivre est un aliment riche en alpha-pinène, un terpène qui inhiberait le THC. De plus, votre esprit sera trop occupé à gérer cette explosion de saveur pour se laisser aller aux théories sans fondement qui peuplent les rêveries anxieuses.
1 https://mashable.com/article/cbd-thc-ratios; https://leafwell.co/blog/why-does-the-1-to-1-cbd-to-thc-ratio-work-so-well/#How%20Do%20the%20Effects%20of%20Different%20CBD:THC%20Ratios%20Vary?
2 https://www.leafly.com/news/cannabis-101/why-does-cannabis-cause-paranoia-and-anxiety
