Les différentes variétés de cannabis (il y en a près de 800) exhalent de nombreux parfums, parfois fruités, floraux, herbacés ou forestiers. Ceux-ci ont une fonction naturelle, comme chasser les insectes nuisibles ou attirer ceux qui contribuent à la pollinisation. Mais ce qui est le plus fascinant, c’est que ces odeurs proviennent des terpènes, une substance sécrétée par la glande résineuse du bourgeon dont on commence à mesurer le très prometteur potentiel thérapeutique.
Puissants effluves
Les odeurs recèlent un extraordinaire pouvoir.
Elles peuvent instantanément convoquer un souvenir enfoui dans la mémoire lointaine de l’enfance. Elles ont aussi la capacité d’exciter, d’aiguiser l’attention ou de rebuter violemment.
Depuis le début des années 1990, les casinos de Las Vegas emploient même des experts en parfums afin de stimuler les joueurs et de les inciter à passer plus de temps dans leurs établissements. (Cela fonctionne à un point tel qu’il est souvent possible d’acheter ces fragrances et de les rapporter chez soi, une offre qui connaît un grand succès auprès des touristes.)
Si elles peuvent ainsi séduire afin de servir les intérêts marchands, les odeurs peuvent aussi calmer, voire guérir. C’est toute l’idée de l’aromathérapie.
Au Japon, des scientifiques s’intéressent à l’effet psychologique et physiologique des « bains de forêt », un joli terme qui désigne le fait de passer quelques heures dans un environnement sylvestre. Surtout dans les forêts de conifères, qui eux aussi produisent ces fameux terpènes, composants d’huiles essentielles qui génèrent des odeurs (et des saveurs, pour le cannabis) aussi variées que le clou de girofle, le citron, la lavande, le basilic, le houblon ou le romarin.
Aussi, après s’être intéressés aux cannabinoïdes (le THC et le CBD), un nombre croissant de chercheurs se penchent sur les vertus potentielles de ces molécules dont le pouvoir pourrait être aussi important que celui des autres composants chimiques du cannabis.
Ceci n’est pas (qu’)une moufette
Avec la légalisation du cannabis, et donc l’apparition sur le marché de très nombreuses variétés, on est désormais à même de vérifier qu’elles n’exhalent pas toutes un entêtant parfum de moufette.
Plusieurs de ces variétés tirent d’ailleurs leur nom d’odeurs qui émanent de la fleur. Ce qui a donné à certaines souches aux arômes inhabituels des dénominations aussi peu inspirantes que Cat Piss (promet une forte odeur d’ammoniac) ou Sour Cheese (on vous laisse deviner). Mais le plus souvent, s’il est question de fragrance, on souligne par leur nom que les variétés exhalent des odeurs de fruits (Tangerine Dream, Strawberry D-Lite, Fat Banana), de fleurs (Lavender), voire d’hydrocarbures (Sour Diesel).
L’effet thérapeutique des terpènes
Par-delà leur fonction dans l’environnement naturel (comme avec les insectes, tel que mentionné plus haut), on croit que les terpènes pourraient être responsables de nombreux effets positifs sur l’être humain.
Les recherches sont encore trop récentes et peu répandues, donc il est encore impossible de l’affirmer avec certitude, mais il se pourrait fort bien que, de la même manière que le THC et le CBD agissent en symbiose, les terpènes aient eux aussi leur rôle à jouer dans l’effet produit par la consommation d’une souche de cannabis plutôt qu’une autre.
Tous ces composants chimiques agiraient donc de concert, influant sur l’effet produit, selon la composition d’une variété particulière.
C’est ce qu’on appelle l’effet d’entourage.
Il est donc fort probable que, par exemple, un terpène comme le linalol, aussi présent dans la lavande, ait le même effet calmant dans le cannabis. À l’inverse, le limonène, qui donne à la plante un parfum de citron, contribuerait à créer un effet stimulant.
De manière encore plus poussée, il existerait des effets soignants plus prometteurs encore chez les terpènes. On sait déjà que les bains de forêt, par exemple, produisent des effets positifs sur le plan psychologique, mais qu’ils ont aussi un pouvoir anti-inflammatoire. Des études à propos du cannabis commencent à pointer dans la même direction.
Comme nous l’évoquions plus tôt, les recherches à propos des effets des terpènes dans le cannabis se multiplient. En plus des mêmes propriétés qu’on prête à ceux des conifères, comme de contribuer à apaiser différentes formes d’inflammation, les terpènes du cannabis réduiraient aussi les effets indésirables de la chimiothérapie.
Et ce n’est qu’un début. La science ne commence qu’à s’intéresser aux interactions des molécules présentes dans le cannabis, à ses effets selon les différents modes de consommation, à l’effet d’entourage… Bref, pour emprunter un slogan connu : le meilleur est à venir.